Extrait de Fiches anthropologiques de Caïn
Né de la colère
Je suis debout
depuis toujours dans la savane
je marche sans but
J'ai un frère et des pierres
qu'il suffit de frapper
pour que jaillisse la terrible lumière de l'air
Le meurtre vient au rêve
quand l'oeil et le souffle habitent
la même nuit
déchirée sous les dents du carnassier
J'ai faim
Le ventre ne pointe jamais le ciel
tout rond
impatient de rebondir au sol
L'offrande dans la fumée masque l'éternité
à l'entière fraternité
Un nourrisson se lève et dit
que le frère périra dans l'abondance
avant la récolte
Que le frère arrachera les pierres
de son champ
toutes les pierres ensanglantées
Avec lesquelles il dressera des murailles
et des temples
autant de geôles
pour les saisons sur le ciel
Avec les siècles elles deviendront
peu à peu
tombeaux recouverts de mousse
de ronces
et de débris
Les pierres marqueront alors le pas de la terre
pour l'éternité
Ô mon frère
le paradis ne prendra jamais pays
Il est circonscrit à l'espace et au temps
L'offrande
ici
n'est jamais charnelle
Elle ne calmera jamais la tempête de ton coeur