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Renaud Longchamps

Photographié par Stéphanie Gilbert.

Extrait de Babelle 4. Sous l'Éden

 

 

 

MÈRE AMÈRE

 

Nous connaîtrons la joie

De nouvelles prairies,

D'incessantes collines,

Et d'arbres chargés de fruits

Aux parfums enivrants.

Nous connaîtrons la joie de la demeure

Réchauffée au soleil,

Caressée par le vent,

Offerte aux étoiles.

Le jardin, tout près,

Sera serre et semences

Avant tout abondance

Pour l'humanité véloce.

Mon ami, le travail même sera libération.

Il offrira à tous

Le repos et l'espoir dans un même corps.

Oui, mon ami,

Nous connaîtrons enfin la joie!

 

MÈRE AMÈRE et PÈRE PERDU (duo)

 

Nous connaîtrons la joie

De naître à la vue de tous,

De renaître nus

Et d'offrir au Soleil l'espace de notre coeur,

Lui offrir l'espace occupé par les corps enlacés,

Le temps d'une étreinte,

Le temps d'un baiser.

 

MÈRE AMÈRE

 

Nous reconnaîtrons nos enfants

Au loin, dans le couchant,

Au retour d'une promenade.

Nous mettrons un visage sur les voix

Qui ne vivront plus dans l'obscurité.

Nous mettrons fin aux regards aux abois.

 

MÈRE AMÈRE et PÈRE PERDU (duo)

 

Nous mettrons un visage sur les voix.

Nous mettrons fin aux regards aux abois.

 

PÈRE PERDU

 

Oui, mon aimée,

Un jour nous serons dignes

De la lumière retrouvée.

Partout sur la Terre,

Nous rendrons l'humaine nature responsable

Du jour et de la nuit.

Ainsi, dans l'obscurité,

Comme dans le tranchant du jour,

Chaque être humain portera

À la poitrine

Une lampe allumée.

Ainsi nous reconnaîtrons les hommes libres

Dès leur naissance.

Et, dans leur descendance,

Nous scellerons l'alliance de l'humanité

Avec la lumière retrouvée du corps

Et la secrète chaleur de l'âme.

Mais, pour voir enfin ce temps béni,

Nous devons sans cesse creuser,

Creuser, creuser, toujours creuser.

Creuser et déplacer des tonnes de débris,

Des montagnes de gravats.

Avec le temps,

Dans les années comme dans les siècles,

--- Demain, peut-être! ---

Nous rejoindrons les communautés humaines

Dispersées, perdues, désemparées.

Puis, un soir d'orage, de vent, d'éclairs,

Nous sonnerons l'heure de la révolte.

Tous ensemble,

Dans un même élan,

Nous détruirons les Golems,

Nous abattrons les Géants!