AMOURS/MEXICO
TEOTIHUACAN
Je marchais seul dans l’Allée des Morts
De chaque côté
les spectres de mes ancêtres
s’inclinaient sur mon passage
Depuis longtemps ils m’attendaient
avec leurs prières secrètes
J’allais d’un pas lent mais assuré
présider à mon sacrifice
J’étais une ombre avant même de mourir
Je portais ma cendre
dans un calice serti de petits crânes menaçants
Ainsi j’allais à la pyramide du Soleil
m’offrir aux vents mauvais et aux enfers ancestraux
J’ai gravi les marches sans m’arrêter
tout en récitant à haute voix les litanies
de ceux qui ont déjà renoncé à la vie
Tout en haut
et seul comme je l’ai toujours été
j’ai penché mon calice
Sous le vent mauvais je m’apprêtais à disperser mes cendres
J’étais prêt à retourner au néant
qui m’appelait depuis si longtemps
À cet instant je t’ai vue
Je t’ai vue quand tu t’es approchée de moi
alors que j’étais en larmes et en effroi
Je t’ai vue dans les couleurs éclatantes de ta robe
dans l’anthracite de tes yeux
dans l’ébène de tes cheveux
Tu es venue à moi
et à toi seule tu étais la lumière du monde
tout ton être vibrant pour cet instant solennel
Aussitôt je me suis senti libre
d’aimer à nouveau ce monde amer
que je m’apprêtais à quitter
en silence et sur la pointe des pieds
Maintenant tu es mon éternité
mon espace infini où je marcherai
enfin
vers ma destinée
Avant de descendre
je te laisserai ma gratitude
pour me perdre dans le Soleil levant
Avant de descendre
je t’offrirai mon cœur
car je te dois la vie
Une vie que tu seras libre de reprendre
quand tu cesseras de m’aimer
Le vendredi 17 octobre 2014.